Compétition sportive et droit international des investissements. Quelques élucubrations juridiques à l'approche de la Coupe du monde de football au Brésil et des Jeux olympiques de Rio de Janeiro

AuthorFranck Latty
PositionProfesseur à l'Université d'Auvergne (Clermont-Ferrand 1), France
Pages149-169
Compétition sportive et droit international des investissements. Quelques élucubrations
juridiques à l’approche de la Coupe du monde de football au Brésil et des Jeux olympiques
de Rio de Janeiro
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Compétition sportive et droit international des investissements.
Quelques élucubrations juridiques à l’approche de la Coupe du
monde de football au Brésil et des Jeux olympiques de Rio de Janeiro
FrAnck lAtty
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Resumo
Utilizando-se do exemplo brasileiro, a presente contribuição tem por objetivo
verificar se a competição esportiva internacional é suscetível de se beneficiar da
proteção conferida pelos instrumentos internacionais relativos aos investimentos. A
resposta apresenta-se positiva: as organizações esportivas respondem pontualmente
à qualificação de investidor e a competição à de investimento. Desta forma, as
organizações esportivas podem se utilizar, e comparecer perante um tribunal arbitral,
das normas internacionais de tratamento e proteção de investimentos contra o Estado
anfitrião da competição.
Résumé:
À travers le cas brésilien, la présente contribution a pour objet de vérifier si la
compétition sportive internationale est susceptible de bénéficier de la protection
apportée par les instruments internationaux relatifs aux investissements. La
réponse s’avère positive: les organisations sportives répondent potentiellement à
la qualificat ion d’investisseur et la compétition à celle d’investissement. Dès lors,
les organisations sportives pourraient se prévaloir, y compris devant un tribunal
arbitral, des normes internationales de traitement et de protection des investissements
à l’encontre de l’Etat d’accueil de la compétition.
Dans le calendrier sportif mondial, il est rare qu’un Etat accueille sur son territoire
à seulement deux ans d’intervalle les deux plus grandes compétitions internationales
que sont les Jeux olympiques (JO) et la Coupe du monde de football. Après le
Mexique2, l’Allemagne3 et les Etats-Unis d’Amérique4 au XXe siècle, c’est au Brésil
que revient ce privilège d’autant plus disputé que l’obtention du droit d’organiser les
compétitions internationales fait lui-même l’objet d’une compétition sans pitié, dans
laquelle les Etats n’hésitent pas à s’impliquer en s’engageant à satisfaire les exigences,
1 Professeur à l’Université d’Auvergne (Clermont-Ferrand 1), France. Cet article s’inspire de propos tenus lors du cours sur «Le droit olympique
dans la société internationale» professé par l’auteur à l’Université du Minas Gerais (Belo Horizonte, Brésil) en juillet 2010, dans le cadre des
VIe Curso de inverno de direito internacional. L’auteur tient à remercier pour son invitation et son chaleureux accueil toute l’équipe du Centro
de direito internacional (CEDIN) et tout particulièrement son président et ami le Professeur Leonardo Neimer C. Brant.
2 Jeux de Mexico en 1968, Coupe du monde en 1970.
3 Jeux de Munich en 1972, Coupe du monde en 1974.
4 Coupe du monde en 1994, Jeux d’Atlanta en 1996.
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y compris juridiques, des organisations sportives internationales. Puissance politique
montante, puissance économique en plein essor, puissance footballistique incontestée,
le Brésil a su s’attirer les faveurs successives de la Fédération internationale de football
association (FIFA) et du Comité international olympique (CIO): à la Coupe du monde
de la FIFA en 2014 succéderont les Jeux olympiques de Rio de Janeiro en 2016.
Dès lors que l’Etat brésilien est impliqué dans ces événements qui sont, par ailleurs,
la propriété de deux associations de droit suisse correspondant à la qualification
d’organisations non gouvernementales (CIO et FIFA), le juriste de droit international
ne peut se désintéresser du cadre normatif qui entoure les JO et la Coupe du monde.
Certes, le droit international n’a pas vocation à régir directement ces compétitions,
qui demeurent avant tout sous l’emprise des règles produites par chacune des deux
organisations privées concernées – en référence à la lex mercatoria du commerce
international5, il n’est pas injustifié de parler d’une lex olympica et d’une lex fifa
réglementant respectivement les Jeux et la Coupe6.
Il est toutefois un domaine du droit international, au demeurant en pleine expansion
depuis une vingtaine d’années, qui aurait vocation à «saisir» la compétition sportive
internationale, du moins dans ses aspects économiques: le droit international des
investissements. Avec l’explosion de la commercialisation du sport depuis les années
1980 (sponsoring, droits télévisés, produits dérivés etc.), la compétition a cessé d’être
un événement exclusivement sportif. Jeux olympiques et coupes du monde sont rentrés
de plain-pied dans la sphère économique tant les investissements qu’ils nécessitent et
les flux économiques qu’ils génèrent sont devenus des données incontournables, que
le droit international des investissements pourrait couvrir de son emprise.
Le droit international contemporain des investissements est un droit éclaté
qui repose pour l’essentiel sur un réseau d’environ 3000 traités bilatéraux relatifs
aux investissements (TBI), dont il est admis qu’ils offrent en tant que tels des
voies de recours directes aux investisseurs d’une partie contre l’autre Etat partie,
habituellement devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs
à l’investissement (CIRDI) ou selon le règlement d’arbitrage de la Commission des
Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI). Depuis 1990, le
nombre de litiges portés devant les tribunaux arbitraux a explosé7. Les investisseurs
ont bien intégré le fait qu’ils pouvaient se prévaloir des standards de traitement et de
protection contenus dans les TBI, au point que le système est parfois considéré comme
étant déséquilibré: trop favorable aux investisseurs, il met systématiquement l’Etat en
position de défendeur, les intérêts publics qu’il a en charge devant céder le pas devant
5 V. l’article fondateur de B.Goldman, «Frontières du droit et lex mercatoria», Archives de philosophie du droit, 1964, vol. IX, pp. 177-
192 et, en langue anglaise, C. Schmitthoff, «International Business Law: A New Law Merchant», Current Law and Social Problems,
University of Toronto, 1961, pp.129 et s.
6 Sur ces questions, v. F. Latty, «Les Jeux olympiques et le droit international. Rendez-vous manqué et rencontres du troisième type»,
Annuaire français de relations internationales, 2009, pp. 945-964 et «La ‘lex fifa’», in M. Maisonneuve (dir.), Droit et coupe du monde,
Paris, Economica, 2011, à paraître. Les textes ci-après cités émanant du CIO et de la FIFA peuvent être consultés sur leur site respectif:
www.olympic.org et www.fifa.com.
7 Pour un «rapide survol» de l’évolution du droit international des investissement et l’explosion de l’arbitrage transnational, v. Ch. Leben,
«L’évolution du droit international des investissements: un rapide survol», in Ch.Leben (dir.), Le contentieux arbitral transnational relatif
à l’investissement. Nouveaux développements, Paris, Anthemis/LGDJ, 2006, pp. 9 et s.
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