AFFAIRE NIETO MACERO c. ESPAGNE

Judgment Date08 October 2013
ECLIECLI:CE:ECHR:2013:1008JUD002623412
Date08 October 2013
Application Number26234/12
CourtThird Section Committee (European Court of Human Rights)
CounselOSUNA GOMEZ F.
Applied Rules6;6-1
<a href="https://international.vlex.com/vid/convenio-europeo-libertades-fundamentales-67895138">ECHR</a>





TROISIÈME SECTION







AFFAIRE NIETO MACERO c. ESPAGNE


(Requête no 26234/12)










ARRÊT




STRASBOURG


8 octobre 2013







Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.


En l’affaire Nieto Macero c. Espagne,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en un comité composé de :

Ján Šikuta, président,
Luis López Guerra,
Nona Tsotsoria, juges,
et de Marialena Tsirli, greffière adjointe de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 17 septembre 2013,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1111. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (nº 26234/12) dirigée contre le Royaume d’Espagne et dont un ressortissant de cet Etat, M. Alberto Manuel Nieto Macero (« le requérant »), a saisi la Cour le 16 avril 2012 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant a été représenté par M. F. Osuna Gómez, avocat à Séville. Le gouvernement espagnol (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, F. de A. Sanz Gandasegui, avocat de l’État, chef du service juridique des droits de l’homme au ministère de la Justice.

3. Le 11 juillet 2012, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

4. Le requérant réside à Séville.

5. Par un jugement du 27 juillet 2009, rendu après la tenue d’une audience publique au cours de laquelle le requérant fut entendu, le juge pénal nº 5 de Séville acquitta le requérant et trois autres co-inculpés d’un délit d’atteinte à l’autorité. Ils étaient accusés d’avoir lancé des objets sur la route qui auraient entravé le passage d’une voiture de police et provoqué des blessures aux agents qui se trouvaient à l’intérieur et qui auraient dû faire des manœuvres brusques pour les esquiver. Les policiers avaient, en particulier, été placés en arrêt maladie 45 et 60 jours respectivement.

6. Le juge nota que, si les accusés admettaient bien se trouver à l’endroit litigieux, ils niaient avoir lancé un quelconque objet sur la chaussée, les agents de police étant incapables de préciser, au-delà de tout doute raisonnable, lequel d’entre eux était l’auteur matériel du délit.

7. Par conséquent, le juge considéra contraire au principe de sécurité juridique de déclarer les quatre accusés coupables du seul fait d’être présents sur les lieux du délit. En application du principe in dubio pro reo, le juge décida l’acquittement de l’ensemble des accusés.

8. Les agents de police firent appel. L’Audiencia Provincial de Séville considéra justifiée la tenue d’une audience publique et assigna le ministère public et les parties à comparaître. Contrairement à ce qui est prévu à l’article 182 du code de procédure pénale, le requérant ne fut pas personnellement assigné. Quant à son avoué, il reçut la notification seulement deux jours ouvrables avant la tenue de l’audience.

9. Par un arrêt du 13 décembre 2010 rendu après la tenue d’une audience publique sans la présence des accusés, l’Audiencia Provincial de Séville accepta le recours et condamna chacun des accusés, dont le requérant, à des peines de prison d’un an et au paiement d’une indemnisation. Le représentant du requérant assista à l’audience. Dans son arrêt, l’Audiencia accepta les faits déclarés prouvés par le juge a quo et en ajouta un de supplémentaire, à savoir :

« Les objets furent lancés sur la route par les accusés, qui s’étaient mis d’accord tacitement, avec l’intention évidente de s’attaquer à l’intégrité des agents de l’autorité qui se trouvaient dans la voiture officielle ».

10. L’Audiencia considéra que, dans la mesure où les faits objectifs n’étaient pas contestés, à savoir le lancement d’un objet sur la chaussée lors de l’arrivée de la patrouille de police, il convenait de se concentrer sur le comportement des accusés. A cet égard, elle constata un accord de volontés visant à attaquer la voiture officielle. Pour preuve, force était de noter qu’immédiatement après avoir lancé l’objet, les quatre individus s’enfuirent rapidement et sans hésitation. Ceci démontrerait qu’ils se sentaient tous responsables de l’action commise, indépendamment de combien d’entre eux avaient effectivement lancé l’objet. Ils étaient donc tous co-auteurs.

11. Le requérant introduisit une demande de nullité de la procédure, qui fut rejetée au motif qu’elle n’était pas prévue par la loi dans le cas d’espèce.

12. Invoquant l’article 24 de la Constitution (droit à être entendu), le requérant forma un recours d’amparo auprès du Tribunal constitutionnel. Par une décision du 27 octobre 2011, la haute juridiction déclara le recours irrecevable faute de pertinence constitutionnelle de celui-ci.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

A. Constitution

Article 24

« 1. Toute personne a le droit d’obtenir la protection effective des juges et des tribunaux pour exercer ses droits et ses intérêts légitimes, sans qu’en aucun cas elle ne soit mise dans l’impossibilité de se défendre.

2. De même, toute personne a droit à un juge de droit commun déterminé préalablement par la loi, à se défendre et à se faire assister par un avocat, à être informée de l’accusation portée contre elle, à avoir un procès public sans délais indus et dans le respect de toutes les garanties, à utiliser les moyens de preuve pertinents pour sa défense, à ne pas s’incriminer soi-même, à ne pas s’avouer coupable et à être présumée innocente (...) ».

B. Code pénal

Article 550

« Seront considérés responsables d’atteinte à l’autorité ceux qui s’attaquent à des agents ou fonctionnaires publics ou emploient la force à leur encontre, les intimident gravement ou font preuve de résistance active grave, lors que [les agents ou fonctionnaires publics] exécutent les fonctions qui leur sont propres ou à l’occasion de celles-ci.

Article 551 § 1

« Les atteintes à l’autorité mentionnées à l’article précédent seront punies avec la peine de prison de deux à quatre ans et une amende de trois à six mois (...) ou une peine de prison d’un a trois ans (...). »

C. Code de procédure pénale

Article 182

« Les notifications et assignations à comparaitre pourront être effectuées aux avoués des parties, à l’exception de :

(...)

1. les assignations qui, par prescription légale, doivent être faites personnellement aux intéressés,

2. les assignations ayant pour objet la comparution obligatoire de ceux-ci ».

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION EN CE QUI CONCERNE LE PRINCIPE D’IMMÉDIATETÉ

13. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint du fait que l’Audiencia Provincial a effectué une nouvelle appréciation des faits déclarés prouvés par le juge pénal sans le respect du principe d’immédiateté. Il estime qu’il aurait dû être entendu personnellement par la cour d’appel et se plaint de ne pas avoir été notifié personnellement de la tenue de l’audience. La disposition invoquée est ainsi libellée :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) dans...

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