AFFAIRE LIGA PORTUGUESA DE FUTEBOL PROFISSIONAL c. PORTUGAL

Judgment Date17 May 2016
ECLIECLI:CE:ECHR:2016:0517JUD000468711
Respondent StatePortugal
Date17 May 2016
Application Number4687/11
CourtFourth Section (European Court of Human Rights)
CounselROZEIRA G. G.
Applied Rules6;6-1
<a href="https://international.vlex.com/vid/convenio-europeo-libertades-fundamentales-67895138">ECHR</a>





QUATRIÈME SECTION







AFFAIRE LIGA PORTUGUESA DE FUTEBOL PROFISSIONAL c. PORTUGAL


(Requête no 4687/11)










ARRÊT




STRASBOURG


17 mai 2016


DÉFINITIF


17/10/2016


Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Liga Portuguesa de Futebol Profissional c. Portugal,

La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

András Sajó, président,
Vincent A. De Gaetano,
Nona Tsotsoria,
Paulo Pinto de Albuquerque,
Krzysztof Wojtyczek,
Egidijus Kūris,
Iulia Antoanella Motoc, juges,
et de Marialena Tsirli,
greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 29 mars 2016,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 4687/11) dirigée contre la République portugaise et dont une association de droit privé portugais, la Liga Portuguesa de Futebol Profissional (« la requérante »), a saisi la Cour le 14 janvier 2011 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. La requérante a été représentée par Me G. G. Rozeira, avocat à Porto. Le gouvernement portugais (« le Gouvernement ») a été représenté par son agente, Mme M.F. da Graça Carvalho, procureure générale adjointe.

3. Invoquant les articles 6 § 1 et 13 de la Convention, la requérante soutient que la procédure engagée contre elle devant le tribunal du travail de Lisbonne n’a pas été entendue équitablement et dans un délai raisonnable.

4. Le 18 novembre 2014, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. La requérante est la Ligue portugaise de football professionnel (Liga Portuguesa de Futebol Profissional), association de droit privé portugais ayant son siège à Porto.

6. Organisatrice des championnats professionnels de football au Portugal, elle a pour associés les clubs et sociétés sportives qui participent à ces championnats.

A. La procédure devant le tribunal du travail de Lisbonne

7. Le 25 mars 2002, un joueur professionnel de football, Monsieur R. (« le demandeur »), engagea à l’encontre de la requérante, devant le tribunal du travail de Lisbonne (Tribunal do Trabalho de Lisboa), une action en nullité concernant deux clauses d’une convention collective du 8 septembre 1999, notamment son article 52 § 1 (voir ci-après le « droit interne pertinent ») : le demandeur y voyait pour les joueurs professionnels une atteinte à la liberté du travail, garantie par les articles 47 et 58 de la Constitution, en cas de rupture de leurs liens contractuels avec un club.

8. Le 15 mai 2002, la requérante fut invitée à présenter ses observations. Le 12 juin 2002, elle déposa son mémoire en réponse, dans lequel elle soutenait :

que les clauses des conventions collectives de travail relevaient de la liberté contractuelle ;

qu’elles ne pouvaient, dès lors, être soumises à un contrôle de constitutionnalité.

9. Le 19 septembre 2005, le tribunal du travail de Lisbonne débouta le demandeur de ses prétentions, au motif :

que l’article 52 § 1 de la convention collective ne méconnaissait pas le droit au travail du joueur ;

que, par conséquent, cette clause n’était pas incompatible avec les articles 47 et 58 de la Constitution.

B. La procédure devant la Cour suprême

10. Le 12 octobre 2005, le demandeur se pourvut en cassation contre le jugement directement (per saltum) devant la Cour suprême de justice (Supremo Tribunal de Justiça). Il attaqua également le jugement devant la cour d’appel de Lisbonne, dans l’hypothèse où son pourvoi ne serait pas admis.

11. Le 14 novembre 2005, le demandeur déposa son mémoire en cassation. La requérante y répondit le 21 novembre 2005.

12. Par une ordonnance du 1er mars 2006, le tribunal du travail de Lisbonne jugea recevable le recours per saltum introduit par le demandeur.

Le 3 mai 2006, le juge rapporteur chargé de l’affaire à la Cour suprême déclara à son tour le pourvoi recevable, considérant que la loi n’interdisait pas le recours per saltum dans le cadre du contentieux social.

13. Le 23 mai 2006, la Cour suprême invita la requérante à compléter son mémoire en défense du 21 novembre 2005 contre le pourvoi, ce qu’elle fit le 6 juin 2006.

14. Le 31 juillet 2006, le ministère public rendit son avis, concluant à la recevabilité partielle du pourvoi.

Le 5 septembre 2006, les parties reçurent notification de l’avis du ministère public, dans lequel il était fait allusion à l’ordonnance du 3 mai 2006 admettant le recours.

15. Le 7 mars 2007, la conférence (formation semi-plénière) de la Cour suprême rendit son arrêt. Les parties en reçurent notification le 9 mars 2007.

L’arrêt faisait allusion à l’admission du recours per saltum par l’ordonnance du 3 mai 2006.

16. Quant au fond, cet arrêt infirmait le jugement attaqué, en déclarant la nullité des deux clauses litigieuses de la convention collective de travail. Pour ce qui était de l’article 52 § 1, la conférence de la Cour suprême considéra notamment :

que le droit au libre choix d’une profession et le droit de l’exercer étaient du ressort exclusif du législateur ;

que, par conséquent, la clause en question empiétait sur la compétence du parlement.

Lors de cette séance du 7 mars 2007 siégèrent à la conférence de la Cour suprême sept juges conseillers, dont le juge C.A.F.C. comme président.

17. Le 23 mars 2007, la requérante forma une réclamation en nullité devant la Cour suprême. Elle soutenait :

que la notification tardive de l’ordonnance du 3 mai 2006 ne lui avait pas permis de contester l’admission du recours devant la section sociale de la Cour suprême ;

que la Cour suprême avait tranché la question litigieuse de façon inattendue, sur la base d’un moyen qui n’avait pas été discuté par les parties, à savoir l’inconstitutionnalité sous l’angle de la compétence, ou inconstitutionnalité « organique » (inconstitucionalidade orgânica).

18. Le 29 mars 2007, le juge C.A.F.C. fut élu juge au Tribunal constitutionnel (Tribunal Constitucional) par l’Assemblée de la République.

19. Par une ordonnance du 15 mai 2007, la Cour suprême rejeta la réclamation de la requérante, en écartant ses deux moyens comme suit :

s’agissant du premier moyen, la Cour suprême reconnut que l’ordonnance du 3 mai 2006 ne lui avait pas été dûment notifiée, mais retint que la requérante n’avait pas formé de réclamation en nullité dans un délai de dix...

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